Un article publié dans Le Républicain lorrain en novembre 2020, par H.G. avec AFP (source)
Le judo n'échappe pas à la lame de fond des révélations sur les violences sexuelles dans le sport. Photo Franck FIFE/AFP
Il y a d'abord eu le monde du patinage, qui s'est retrouvé dans l'œil du cyclone il y a quelques mois après des révélations de violences sexuelles. Aujourd'hui, le judo est à son tour particulièrement concernée par ces accusations, fissurant un peu plus "l’omerta" qui règnerait dans ce milieu fermé.
Longtemps à l'écart de ces affaires, le monde du judo se retrouve aujourd'hui dans une petite crise, même si tout ça n'a rien de surprenant. "Le phénomène touche tous les sports, il n’y a pas de raison que le judo y échappe", assure une source proche du Comité national olympique et sportif français (CNOSF).
Aujourd'hui, le ministère des sports indique que sur les 313 signalements émis à la "cellule intégrité", (mise en place par le ministère des sports depuis le scandale autour du patinage, au début de l'année 2020), "sept-huit concernent le judo". Outre cela, c'est le témoignage d'une judoka, racontant avoir été violée par son entraîneur à l'âge de 13 ans, dans les colonnes du Parisien, qui a bousculé l'un des sports les plus pratiqués dans l'Hexagone (500 000 licenciés).
Des suspensions, des condamnations… mais des retours sur les tatamis
Les réactions se sont ensuite enchainées, comme celle de Stéphane Nomis, ancien judoka désormais candidat à la présidence de la Fédération française de judo : "C'est évidemment inadmissible, cela ne doit pas arriver dans notre sport".
"On a toujours été du côté des victimes, et on continuera à le faire." Jean-Luc Rougé, président de la Fédération française de judo.
L'actuel président, Jean-Luc Rougé, est lui aussi monté au créneau. "Je suis bien sûr scandalisé. Dans nos clubs on prône des valeurs qui ne sont pas celles-là. On a toujours été du côté des victimes, et on continuera à le faire". En attendant d'éventuelles condamnations, l’entraîneur mis en cause a depuis été "suspendu" de ses fonctions à titre conservatoire.
Mais cette affaire n'est pas la première à faire trembler le judo français. En 2007, déjà, un entraîneur avait été condamné par la justice pour une "agression sexuelle sur mineur"... Mineure qui était une de ses élèves. Après être passé en prison, celui-ci avait toutefois repris ses fonctions auprès d'enfants dans l'est de la France, malgré une interdiction d'entrer en contact avec des mineurs de moins de 15 ans.
"On appelle les gens à parler […] ils seront protégés"
Interrogé en caméra caché par une équipe de France télévisions, l’homme avait expliqué dans un reportage diffusé en février 2019 avoir "repris les cours d’enfants", avec d'autres entraîneurs. Une infraction passible, selon le Code du sport, d’un an de prison. "Il y a des clubs qui ne demandent pas la carte professionnelle, et il y a des bénévoles qui ne connaissent pas les règles", a reconnu Jean-Luc Rougé.
Plus récemment, il y a eu le cas d'un professeur de judo de Nantes âgé de 37 ans, condamné en décembre 2019 pour avoir eu, trois ans plus tôt, des relation sexuelles avec une élève de 13 ans. Mais, là encore, malgré une condamnation, le professeur continuerait d'exercer.
"C’est un sujet compliqué, difficile, et nos éducateurs, nos entraîneurs ne sont pas formés. Il y a une omerta. On n’ose pas dire les choses", regrette Stéphane Nomis, pour qui ces affaires devraient engager la direction fédérale à "un examen de conscience". Jean-Luc Rougé, lui, s’est entretenu mardi avec la ministre des sports Roxana Maracineanu, qui devait joindre la jeune femme ayant témoigné dans le Parisien.
"On a discuté de la stratégie à mettre en place", a expliqué Jean-Luc Rougé. "Ça n’arrive pas qu’aux autres (fédérations, ndlr), et très souvent en plus, ces personnes sont très appréciées. C’est très dur de les déceler. On appelle les gens à parler, à libérer la parole, ils seront protégés", a-t-il tenu à rassurer. Pas sûr pour autant que cela rassure le monde du judo français.
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